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mardi 30 novembre 2010

Et si Reach était bon pour l'industrie ?

reach


Le 1er décembre, la première phase du règlement Reach, relative à l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des produits chimiques dans l'Union européenne, prend fin. Alors que les critiques continuent de fuser à son sujet, certains industriels ont confié à L'Usine Nouvelle que le règlement pouvait avoir un effet bénéfique pour leurs activités.
Mais oui, Reach, c'est bon pour les affaires ! Ce discours optimiste détonne dans le choeur des lamentations auquel nous avait habitués la réglementation européenne sur les produits chimiques. Ces derniers mois, sa mise en oeuvre, qui concerne pratiquement toute l'industrie, frisait le casse-tête insoluble. Complexité des dossiers à remplir, investissements financiers et humains prohibitifs, problèmes de confidentialité des données, difficultés d'approvisionnement de certaines substances... Les PME se disent impuissantes. Quant aux poids lourds du secteur, ils viennent d'obtenir, à l'instigation de Rolls-Royce, EADS et Goodrich, l'appui du gouvernement anglais pour persuader la Commission européenne de reporter l'échéance de la première phase d'enregistrement, fixée au 30 novembre prochain (lire encadré). Bref, toute l'industrie, des producteurs de substances chimiques aux utilisateurs finaux, voit Reach d'un très mauvais oeil. À tort ?

Yves Trias est de ceux qui pensent que ce règlement pourrait renforcer une partie de l'industrie européenne. Une vision décapante. « Reach, c'est du protectionnisme déguisé, assure le directeur France de Sherwin-Williams Coatings, l'un des leaders mondiaux de la peinture. Ce règlement va assainir le marché européen de la chimie. » Les industriels qui tiennent ce discours sont encore rares... Mais leurs rangs pourraient grossir. L'Union des industries chimiques (UIC), fer de lance de la contestation en France, semble, elle aussi, à la veille d'infléchir son discours. En 2003, l'UIC estimait que « l'économie française sera lourdement impactée ». Cinq ans plus tard, le ton s'adoucit : « L'impact économique significatif sur la compétitivité de l'industrie européenne constitue une source de préoccupations pour la profession. » Aujourd'hui, des effets bénéfiques sont même envisagés. « À terme, Reach pourrait tirer le marché européen, affirme Jean Pelin, le directeur général de l'UIC. Les bénéfices économiques tangibles en Europe restent à prouver. Mais une fois digéré, il est vrai que Reach pourrait devenir un avantage concurrentiel. »
UNE CONTRAINTE... POUR LES MOINS REGARDANTS
Au coeur de l'argumentaire, un principe simple qui résume le règlement : « Pas de données, pas de marché. » Pour comprendre, il faut rappeler que Reach impose aux producteurs, formulateurs et importateurs de substances et d'articles d'établir un dossier détaillé sur chaque produit utilisé. Il peut faire jusqu'à 700 pages et coûter de 100 000 à... 2 millions d'euros ! En l'absence de dossier, impossible de faire commerce d'une substance en Europe. Les documents nécessaires sont beaucoup plus difficiles à obtenir lorsque les produits sont importés depuis des pays où les réglementations en matière de substances chimiques sont plus souples ou quasi inexistantes... « Ce sont les industriels qui ont été moins regardants sur leurs approvisionnements qui râlent, affirme Yves Trias. Ils réalisent qu'ils ne vont plus pouvoir utiliser certains produits moins chers en provenance, par exemple, d'Inde et de Chine. »
En France, Sherwin-Williams se fournit auprès de groupes tels que BASF, Bayer ou encore Arkema. «Tous mes concurrents qui achètent des produits à bas prix hors Europe sont morts et je m'en réjouis,assène Yves Trias. Ceux qui auront toujours respecté des règles éthiques n'auront pas de difficultés. »
LA LOI CONTOURNÉE VIA LES ÉTATS-UNIS
Le règlement éviterait donc une mise en concurrence déloyale entre des industriels qui ne subiraient pas les mêmes contraintes. D'une certaine manière, tous les acteurs vont dorénavant jouer avec les mêmes règles du jeu. Reach, toujours selon Yves Trias, va avoir pour effet d'augmenter les prix de ceux qui se fournissent hors Europe.
« J'ai appris que certains industriels au Maghreb ne pouvaient plus exporter certaines substances en raison du coût et de la complexité des dossiers », confirme Jean Pelin. Les industriels européens pourraient donc être incités à se tourner vers des fournisseurs... européens.
Le raisonnement a ses limites. Des groupes basés aux États-Unis ont par exemple proposé à des sociétés européennes d'importer leurs substances sur le sol américain pour ne pas être « embêtées ». Certaines se seraient laissées tenter... Reach engendrera-t-il des hausses de volumes de production et des augmentations de marges en Europe ? Difficile à dire pour le moment. Jusqu'ici, les industriels y voyaient surtout l'occasion de redorer l'image quelque peu ternie de la chimie. L'UIC pourrait même se pencher sur la question des éventuels bénéfices économiques de Reach, et tenter de les évaluer prochainement. Une approche radicalement nouvelle. Et qui pourrait faire tache d'huile.
Fin d'une étape
Le 30 novembre s'achèvera la première échéance de la réglementation Reach (Enregistrement, évaluation et autorisation des produits chimiques). Cette étape, qui concernait surtout des sociétés de taille importante, devrait avoir vu l'enregistrement de près de 4 800 substances. Ce règlement vise à harmoniser et à moderniser la législation européenne en matière de substances chimiques. Attention, toutefois : elle concerne les producteurs, mais aussi les formulateurs et importateurs. Et, en bout de chaîne, les utilisateurs finaux appartenant à des secteurs aussi variés que l'automobile, l'électronique, l'habillement, la construction... L'obligation d'enregistrement des substances est établi suivant un calendrier progressif qui s'étend en fonction des tonnages jusqu'en 2018.